Dans une autre vie, j'ai eu la chance exceptionnelle de pouvoir apprendre avec une parente en Italie quelques pas de valse.
A mon retour en France, j'expérimentais pour la première fois ce que j'avais appris... bon, ok, les soirées Hard-Rock-Metal-gothic-j'ai-l'air-d'un-méchant-parceque-je-me-peint-en-noir-et-que-j'hurle-dans-un-micro-en-disant-fuck-à-la-société... de mes très chers amis lycéens n'étaient pas ce que l'on pourrait appeller le moment "opportun" pour placer une valse... et pourtant, c'est bien mal me connaître que penser que je m'y serais abstenu.
C'est exactement là le moment de montrer que l'on est classique et ainsi d'être le plus original... c'est tordu, mais ca marche très bien. C'est ainsi que je dansais quelques valses avec mes compagnes du moment qui découvrait cette danse.
La plus grande expérience était quand même la fois où, malgrè la présence de fille vraiment très mignonne dans la soirée, je me détournais de celle-ci pour aller danser avec la grand-mère de mon hôte qui dansait fort bien la valse.
Après quelques essais ensemble, mon hôte aussi du reste.
Que dire sur cette danse, si on peut l'appeller ainsi, c'est un transport entre le rêve et la réalité, c'est au dessus de rythmne du fait même que ce soit extrêmement exigeant et académique, on ne peut pas, d'après moi, danser une valse avec quelqu'un que l'on aime pas. S'approcher d'une femme, l'étreindre et la serrer contre soi, la transporter doucement dans une tornade silencieuse où ne comptent plus que ces yeux (et ces pieds quand même... désolé d'être terre-à-terre mais c'est rapide de trébucher et là ca annule tout le rêve, je vous garanti...), c'est cela valser.
Valser, c'est faire l'amour.
C'est pourquoi la chanson de Brel, devenue plus que réference pour moi, la Valse à Mille Temps, mettant la ville des lumières de notre très grande Nation en avant, est si importante pour moi et pour une certaine partie de ma vie. Je réponds ici à une question que l'on me posa il n'y a pas si longtemps : Pourquoi c'est devenu "Notre chanson" ?
Je l'expliquerais en reprenant les paroles de Brel qui sont si importante pour moi en les accompagnant de mes ressentis personnelles face aux femmes avec qui j'ai dansé et dont le souvenir reste encore dans mes mains.
Au premier temps de la valse
Toute seule tu souris déjà
Au premier temps de la valse
Je suis seul mais je t'aperçois
Et Paris qui bat la mesure
Paris qui mesure notre émoi
Et Paris qui bat la mesure
Me murmure murmure tout bas
Le premier temps pose les pas.
On se croise, un sourire sur les lèvres, discutant de tout et de rien. On est seul, à deux. On s'avance et s'effleure. Sans poser les yeux sur toi, je te vois tout entière, tu me fixes, indécent regard, et attends de mes mains les signes de mes pas... tu me fixes, insolent désir, en espérant deux mots pour t'inviter et cent pour mimer.
Les préliminaires d'une valse sont aussi intenses que le moment en lui-même. Les mêmes pas se dessinent : on tourne chacun autour de l'autre. Déjà en cet instant, une légère brise se lève... et emporte quelques feuilles dans de chétifs tourbillons... une voix porte un pas en avant : Aime ! ...
... La partenaire éclaire la pièce comme une pépite entourée de boue trouvée au hasard d'un fleuve... le partenaire doit l'humilité du découvreur, heureux mais égoïste, donc silencieuse, et l'habileté de l'orfèvre...
Au premier temps, les sourires se dessinent. Entente cordiale entre deux esprits en connection soudaine ou soudain éclair jaillissant de nul part pour poser les prémisses de la vigne et de l'olivier ?
Au deuxième temps de la valse
On est deux tu es dans mes bras
Au deuxième temps de la valse
Nous comptons tous les deux une deux trois
Et Paris qui bat la mesure
Paris qui mesure notre émoi
Et Paris qui bat la mesure
Nous fredonne fredonne déjà
Premier mouvement, on est à deux, on le sait, ce sera le temps d'un tour, de deux tours, trois, quatre, un jour ca s'arrêtera... ou pas... un jour nos pieds seront fatigués... à nous de savoir si l'on se sent de repos nos pieds sur ceux du partenaire ou de faire mine de ne point souffrir pour... un jour... s'écrouler, éreinté.
Car valser fatigue. Non seulement les jambes, les yeux et le centre même de l'équilibre mais également les nerfs, les sentiments et nos perceptions des choses. On se met à marcher comme la partenaire, on se met à regarder par ses yeux... n'est-ce pas cela le vrai sens de la valse ? Former qu'un... un être qui tourne, sans s'arrêter, sans réfléchir à ses pas, qui vit pour soi, en oubliant ce qu'il fût, en oubliant les deux êtres qui le composent...
Est-ce dégradant de s'y oublier ? Est-ce que, lorsqu'on se rend compte à un certain moment que nous fûmes auparavant quelqu'un, il faut tout lâcher au risque de se précipiter dans un mal plus fort encore que la perte de soi ? En atterissant, on a le tourni.. parfois pour un temps... parfois pour l'éternité.
Certains habitués, des danseurs professionnels, y arrivent fort bien. Ils maîtrisent assez bien leur partenaire et leur coeur pour pouvoir danser, lâcher, reprendre, valser, lâcher, reprendre, aimer, lâcher... pour les personnes nobles, amateurs de la valse unique, à la recherche de celle qui ne cessera que par leur ultime pas, pour eux alors, l'invitation est exceptionnelle et le tourni est éternel... tout est une question de sensation, de sensibilité.
Au troisième temps de la valse
Nous valsons enfin tous les trois
Au troisième temps de la valse
Il y a toi y a l'amour et y a moi
Et Paris qui bat la mesure
Paris qui mesure notre émoi
Et Paris qui bat la mesure
Laisse enfin éclater sa joie
Dans la tourmente, on ne peut penser à rien. Cette si douce faculté qui nous faisait imaginer notre avenir, rappeller notre passé, apprécier ou souffrir de notre présent n'est plus. Les esprits, l'esprit, s'empreignent du corps d'autrui... la main droite se soude au buste, les deux mains gauches serrées gèlent soudainement... les souffles participent au toubillon invisible... les regards se pénètrent et deviennent des passerelles vers un monde d'infini, l'allure s'accélère... On ne parle pas... pas un mouvement de lèvre ne défigure les sourires comme figés dans cet espace en marbre aux couleurs de l'insaisissable... chaque mouvement, chaque pas, s'impose au monde spontanément comme une expression nouvelle de Dame-Nature.
Les arbres fleurissent, les herbes poussent, les animaux vivent selon la chaîne alimentaire, le ciel gronde, pleure ou siffle... et, eux, ils dansent.
Au dernier temps de la valse, les partenaires ne bougent plus, le monde, leur monde, tournent autour d'eux.
Commentaires
J adooore!!!!
Alors je dois avouer que les soiree metalleux goth je sais pas quoi m ont fait hurler de rire!!! mais tu as toujours éte le plus trash metal d entre nous mon ami... Ma grand mere est tres forte en tango aussi, je vous arrange un rencard au dansing? Vous croyez que j ai pas compris votre petit jeu???
ps: a lépoque, je mettrais ca sur le compte de ma naïvete prepubere, je n avais pas saisi toute la dimension sexuelle et sensuelle de la chose. Merci de tes lumières...On redanse quand ensemble???