Bon puisque tout les blogs en parlent, il faut bien s’y mettre aussi.
Ce soir, j’ai écouté attentivement le fameux juge burgeaud, ou du moins, les passages choisis par le journal de TF1. A la base, je ne m’intéresse que peu aux affaires juridiques... cependant, avec le matraquage qui a sur cette affaire, c'est assez dur de ne pas s'y intéresser.
Et là, celui qui me lit se dit, "il n'a pas été touché par cette affaire, c'est un monstre"... non. J'ai été touché, bien sûr, par son sujet mais, comme déjà je ne comprend pas grand chose au Droit... que, pour moi, tout ca, c'est un peu comme de la paperasse cumulative... et qu'il n'y a pas d'autres protections individuelles que celle du contrat féodal dans les limites du territoire de son seigneur, et que... non, excusez-moi, les cours de médévial qui m'enserrent subitement.
En fait, j'ai beau essayé, j'ai beaucoup de mal à m'intéresser au Droit contemporain en général. Ce n'est donc qu'avec des yeux naïfs et populaires que je porte un regard sur cette affaire (et c'est pour cela que je ne me suis jamais exprimer sur ce sujet).
Il parait que le témoignage du juge burgeaud était quelque chose de très attendu. Avant celui-ci, j'ai entendu beaucoup de chose à ce sujet : on a parlé de lynchage médiatique, de problème du système juridique francais, d'incompétence du juge, de pédophilie, de suicide, d'accusés à tord... bref, tout ce qui tourne autour de cette affaire avait l'air de se tenir entièrement dans cette phase finale : que dira le juge pour sa défense ?
Sa défense... le terme résonne un peu mal dans mon esprit. Non que je le trouve pas approprié si celui-ci a envoyé 13 personnes non coupables... mais je ne sais pas si lorsqu'on fait une erreur dans le cadre de son métier, on peut être considéré comme volontairement responsable.
J'ai donc écouté ce qu'il avait à dire sans vraiment avoir d'opinion préconcue comme tout ceux qui ont déjà suivi l'affaire depuis le début. Enfin, je veux dire plutôt sans avoir pu juger au préalable les indices portés par l'un et l'autre des deux camps pour me faire une opinion.
Tout ce que je savais c'est que : "la justice française allait mal" comme le titrait une émission d'ARTE qui en parlait justement il y a une semaine. J'avais l'impression que ce petit homme chétif, menue et tout tremblant avec son costard usé portait l'ensemble des paradoxes de notre justice en cet instant.
Ainsi donc, je parle librement et sans influence puisque je n’ai pas vraiment suivi de très près l’affaire, sauf contraint et forcé par les répétitions incessantes du journal parlé depuis quelques années maintenant.
Alors, que voyait-on ? une grande assemblée de "prélats" bardés de titres universitaires qui pointaient du doigt UN homme. Derrière eux, des journalistes d'un coté qui scrutaient la moindre larme, ou le moindre scandale, et les victimes du jugement de l'autre, qui dévoraient, par des yeux de braises, l'accusé mis au ban.
Les questions posées au juge furent assez accusatrices. Sous prétexte d'essayer de "comprendre" l'affaire, j'ai plutot ressenti un préjugé de la part de ses pairs : Pour moi, il était assez clair qu'il était là pour se faire démolir.
En même temps, je me dis que s'il avait fait consciencieusement son travail et qu'il n'avait rien à se reprocher profondemment, il ne serait peut être pas aussi mal à l'aise et aurait répondu d'une manière plus... professionnel.
Car, du coté du Juge Burgeaud, il faut dire que ce fût assez pathétique. Au tableau purement physique que j'ai réalisé tout à l'heure, il faut rajouter ses réponses et son attitude... et c'est là où on s'apercoit qu'il y a comme un décalage.
Ai-je vu un juge d'instruction, conscient des procédures, connaissant le dossier sur le bout des doigts, ayant à l'esprit l'ensemble des institutions avec lesquelles il travaille tout les jours ?
Non. J’ai eu l’impression plutôt de voir un étudiant de droit en deuxième année à son oral de fin de semestre.
J'ai dit tout à l'heure que les questions étaient orientées. C'est vrai mais les questions de Droit pur, elles, ne l'étaient pas. Quand on demande à un juge quelle est la procédure de travail à réaliser en telles ou telles situations, quelles sont les institutions auxquelles il faut faire appel, et qu'il répond soit AghhgaAghh.... ou MhhhmmmmmZiiittss ou encore qu'il répond à coté... je me dis que cet étudiant est recalé... seulement voilà... il a déjà les diplômes.
Le problème en soi n'est pas grave : il peut arriver à un historien (au hasard) de mal estimé un document, de ne pas y voir l'essentiel, de faire des contre-sens... ca arrive à tout le monde, même dans sa propre spécialité ! Seulement, sauf si ledit document contient les secrets de la pierre philosophale, il n'y aura jamais mort d'homme pour ca. Dans le cadre du métier de juge, les conséquences sont plus importantes.
Car à la question, était-il sincère ? Comme ca, de visu... j'aurais répondu oui. Cependant, j'ai entendu parlé les victimes par la suite... et d'après eux, c'est un hypocrite... un homme faux et sans regret... Je peux les croire... après tout, l'ensemble des témoins sont unanimes à ce sujet...
Ne voyait-on pas également un coupable qui baissait la tête comme pour recevoir sa punition ? Je l'ai parfois pensé... c'est ce qui semblait..., pourtant encore une fois, à le voir comme ca...
Le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice de notre bonne République Française, s'est alors exprimé à la fin du journal. Il était très attendu lui aussi sur un autre grand terme entendu moult fois : l'"Après d'Outreau"... faut-il une réforme de la justice et de quelle ampleur ? (encore une fois, je ne fais que re-poser la question). Franchement... il aurait pu ne pas venir...
Ses paroles furent, d'après moi, totalement absente d'intérêt... par rapport aux réformes par exemple, il propose encore des réformes de législations alors que ce sont des réformes de terrain sur les institutions profondes dont la justice française a besoin...
J'ai retenu une phrase agacante : "Parceque vous comprenez, là tout les français en voyant cette affaire, se demande et si c'était moi ?"... alors certes j'ai compris ce qu'il a voulu dire... cependant... si dans la vie on a besoin de se replacer au centre des choses pour qu'elle nous concerne enfin... si c'est la peur que des trucs nous arrivent qui nous font comprendre le malheur des autres... si on ne peut pas s'attrister d'un problème dont on ne connait pas l'existence profonde... si on est pas capable de penser à une affaire aussi dure et violente sans se dire qu'on pourrait nous aussi y être impliqué... c'est que nous sommes tombés bien bas.
Au demeurant, j'ai la naîveté de croire que tout les phénomènes, tout les problèmes qui touchent notre grande nation... nous concerne tous.
En fin de compte... voilà... je pèse le pour et le contre et je n'ai toujours pas d'avis sur cette affaire... Deux thèses se profilent à mes yeux, une cohue en colère qui souhaitent la mort d'un jeune juge qui a commencé sa carrière avec la plus grave faute de sa vie ou un juge sans moral qui a voulu à tout prix trouver des coupables, qui a jugé pour d'autres raisons que la pure recherche de la vérité... d'autres thèses pourraient certainement être établies... mais je ne les ai pas vu.
Je me garderais donc bien, et je pense que même les juristes compétents qui ne sont pas un minimum impliqués dans cette affaire devraient en faire de même, d'émettre un avis tranché sur la question.
En fait, si ce genre d'affaire permet de faire comprendre à la France qu'elle se construit sur le Droit le plus minutieux et le plus élaboré au monde, à égalité peut être avec l'anglo-saxon (et encore) mais qu'elle a de grosses lacunes dans son application empirique... alors... il faudra se dire que l'erreur en elle-même aussi horrifiante qu'elle puisse être... aura été utile au moins à une chose.